Loi relative à la recherche sur les cellules souches (LRCS)

Recherche approfondie de la LRCS et de ses implications.

Loi relative à la recherche sur les cellules souches (LRCS)

Votations du 28 novembre 2004

 

Le 28 novembre 2004, le peuple suisse a accepté à 66% la loi relative à la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Nous laissons à votre disposition l’étude que nous avions proposée sur ce sujet en prévision des votations.

 

Premières considérations

Le texte de loi sur lequel nous devons nous prononcer concerne uniquement les cellules souches embryonnaires, bien que son abréviation puisse prêter à confusion («CS» pour «cellules souches», pouvant être comprise dans un sens général : adultes et embryonnaires)[i]. Son appellation exacte est «Loi fédérale relative à la recherche sur les cellules souches embryonnaires».

La recherche sur les cellules souches adultes est très prometteuse et ne représente aucun danger pour la personne sur qui elles sont prélevées.
La recherche sur les cellules souches embryonnaires, elle, pose un problème éthique puisqu’elle provoque la mort de l’embryon sur lequel on les prélève. Ces cellules sont prises sur des embryons produits en surnombre[ii] dans le but d’une fécondation in vitro[iii].

Depuis que les médias débattent sur cette nouvelle loi, ses partisans avancent qu’elle comblerait un vide juridique et mettrait fin à de nombreuses incohérences. Penchons-nous donc sur la loi en vigueur actuellement pour vérifier si cet argument est justifié.

 

 

Que dit la loi actuelle en Suisse? (avant la votation)

Recherche interdite sur des cellules souches embryonnaires

La loi fédérale sur la procréation médicalement assistée (LPMA) dit, à l’article 5, alinéa 3 : «Le prélèvement d’une ou plusieurs cellules sur un embryon in vitro et leur analyse sont interdits

Interdiction de conserver des embryons

Plus loin, à l’article 17, alinéa 3, on peut lire textuellement que : «La conservation d’embryons est interdite.» Ce dernier point concerne la fécondation in vitro.

 

Interdiction de produire des embryons en surnombre

L’alinéa 1 de ce même article stipule clairement dans quelles limites cette technique doit être appliquée : «Ne peuvent être développés hors du corps de la femme jusqu’au stade d’embryon que le nombre d’ovules imprégnés nécessaire pour induire une grossesse durant un cycle de la femme; ce nombre ne peut être supérieur à trois.» On retrouve également cette interdiction dans l’article 119 : 2c de la Constitution : «(…) ne peuvent être développés hors du corps de la femme jusqu’au stade d’embryon que le nombre d’ovules humains pouvant être immédiatement implantés

 

Interdiction de pratiquer le clonage, la formation de chimères et d’hybrides

Ces interdictions ainsi que les sanctions qui seront appliquées à ceux qui les pratiquent sont clairement énoncées dans l’article 119 de la Constitution et 36 de la LPMA.

 

Y a-t-il un réel vide juridique et des contradictions justifiant une nouvelle loi?

Importation des cellules prohibée : contradiction

L’une des principales contradictions évoquées est que ce type de recherche est interdit en Suisse, alors qu’il est autorisé d’importer des cellules souches embryonnaires de l’étranger.

En effet, la loi suisse ne légifère pas sur la question de l’importation des cellules souches. Celle-ci n’est donc pas légale, mais… elle a été autorisée!

 

Autorisation anticonstitutionnelle

En l’an 2000, une chercheuse tessinoise installée à Genève, Marisa Jaconi, a appris que des cellules souches embryonnaires humaines étaient disponibles aux Etats-Unis pour des projets de recherche. Elle a alors demandé au Fonds national suisse (FNS) l’autorisation et les moyens financiers nécessaires, qui a accepté sa demande en novembre 2001.

S’il est vrai que la législation suisse est lacunaire sur ce point, comment se fait-il qu’une fondation de droit privé financée en grande partie par la Confédération donne une autorisation qui engendre la transgression de la Constitution suisse LPMA, article 5, alinéa 3?

Lorsqu’on constate un vide juridique, n’y a-t-il pas lieu de le combler en allant dans le sens des lois existantes plutôt qu’en élaborant une nouvelle loi qui les contredit et les annule?

 

La loi actuelle est-elle appliquée?

Sur plusieurs points, elle ne l’est pas, ce qui donne lieu à des contradictions importantes que seuls les référendaires ont relevées de façon explicite :

 

1° Interdiction de produire des embryons en surnombre bafouée

L’un des principaux arguments évoqués pour justifier le genre de recherche qui nous occupe est de souligner que les embryons sur lesquels elle sera pratiquée sont de toute façon voués à la mort car «surnuméraires», c’est-à-dire ayant été produits en surnombre. Or nous avons vu plus haut que cette pratique est prohibée par la Constitution. Ces embryons n’auraient donc jamais dû être produits.

En 2000, lors du vote sur la fécondation in vitro, ceux qui nous encouragent aujourd’hui à accepter ce nouveau pas avaient garanti qu’il n’y en aurait pas et que la LPMA l’interdisait.

On a également dit qu’il n’est pas possible de procéder à la fécondation in vitro sans produire des embryons surnuméraires. Pourtant, l’hôpital universitaire de Bâle, qui applique la loi depuis 1997, n’a pas eu un seul embryon en surnombre en sept ans. D’autre part, en Italie, par exemple, la loi stipule qu’après trois ans, les embryons qui n’ont pas été destinés à leurs parents naturels peuvent être confiés à l’adoption. Mais l’application de la loi actuelle telle qu’elle est aujourd’hui éviterait d’être confronté à ce problème de surnombre.

 

2° Interdiction de conserver des embryons bafouée

Malgré cette interdiction, il semblerait qu’on conserve actuellement en Suisse entre 1000 et 3000 embryons surnuméraires, selon les sources. On joue alors sur les mots et sur les dates d’entrée en vigueur des lois interdisant leur conservation : on congèle les ovules et les spermatozoïdes déjà fusionnés avant qu’ils n’aient terminé leur fusion de noyau, afin qu’ils ne puissent pas encore être appelés «embryons», on prétend que tous les surnuméraires sont antérieurs à l’interdiction de les conserver. Or on sait que dans la majorité des cas de fécondations in vitro les embryons sont produits en surnombre.

 

 

Pourquoi cette loi est inacceptable

Ethique bafouée

La loi transgresse les limites de l’éthique : pour la première fois, la vie d’un homme pourra lui être ôtée dans l’espoir incertain d’en sauver un autre.

Incompatibilité avec la Constitution

Le principe premier de la loi sur la procréation médicalement assistée (LPMA, art. 3) assure que ladite procréation [in vitro] est «subordonnée au bien de l’enfant». L’article 119 : 1 de la Constitution déclare que «l’être humain doit être protégé contre les abus en matière de procréation médicalement assistée et de génie génétique.

Aucun vide juridique à combler

Le fait qu’elle soit présentée comme une nouvelle loi et non comme une modification du droit en vigueur peut donner l’impression, si l’on ne prend pas la peine d’aller consulter les lois actuelles, de remplir des vides juridiques (p. ex. les pratiques interdites, à l’article 3, etc.). Hormis l’article 27 qui comble utilement les lacunes laissées par la loi fédérale du 25 juin 1954 sur les brevets, la loi relative à la recherche sur les cellules souches (LRCS) n’introduit qu’une seule chose : le droit de pratiquer légalement la recherche sur les cellules souches d’embryons dits «surnuméraires». Pour le reste, elle reprend, refond les morceaux de lois préexistants compatibles avec cette nouvelle donne, et écarte tout simplement ceux qui la contredisent de plein fouet.

 

Affirmations erronées, aberrations et contradictions notoires du texte de loi[iv]

Conclusion
En tant que chrétiens, nous ne pouvons que refuser une telle loi, pour les raisons éthiques de respect de la vie transmises par Dieu dans la Bible (dont voici quelques pistes d’étude). Chaque être est unique, voulu par Dieu avec sa destinée propre et ne peut en aucun cas être instrumentalisé ou considéré comme de la «matière première» pour la recherche – même avec les meilleures intentions (guérison de terribles maladies).

D’autre part, une telle loi ouvre sans conteste la porte à des déviations telles que le clonage. Bien sûr, cela ne se fait pas d’un jour à l’autre : petit à petit, une loi en atténue ou en annule une autre, jusqu’à arriver au résultat escompté. Mais c’est aujourd’hui que nous devons être vigilants et mettre un frein aux dérives futures qui découleront automatiquement de la loi inique qu’on nous recommande d’accepter le 28 novembre 2004.

Natacha Niklaus

 

[i] Différence entre les cellules souches adultes et embryonnaires

Les cellules souches sont capables de se renouveler par division et multiplication et peuvent donner naissance à différents types de cellules aux fonctions spécifiques diverses. Quand une cellule souche se divise, quelques-unes de ses descendantes se différencient, c’est-à-dire qu’elles se spécialisent en devenant des types de cellules bien définis. Les autres descendantes restent des cellules souches. Et contrairement à une cellule spécialisée, une cellule souche est capable de se diviser à l’infini. Elle ne meurt pas au bout d’un certain nombre de divisions.

  1. les cellules souches adultes

Ces cellules sont présentes dans les tissus du corps humain dès la naissance : cerveau, moelle osseuse, le sang, les vaisseaux sanguins, les muscles striés, la peau, la muqueuse intestinale, la cornée, la rétine, la pulpe dentaire, le foie et le pancréas.

Ces cellules sont appelées cellules pluripotentes. Elles sont capables de se spécialiser en beaucoup de cellules différentes mais toujours du même type. Par exemple, pour les cellules souches du sang dans la moelle osseuse, elles peuvent se spécialiser en globule rouge, blanc ou même en plaquettes.

  1. les cellules souches embryonnaires

Elles sont prélevées sur des embryons âgés de 5 à 6 jours (au stade du blastocyste) ou à l’intérieur d’un embryon. Elles sont principalement issues des embryons surnuméraires ou des clonages thérapeutiques qui sont interdits en Suisse. Ces cellules sont appelées totipotentes, parce qu’elles sont capables de former tous les tissus de l’organisme humain (200 tissus différents). Plus l’embryon grandit, plus cette potentialité diminue.

 

[ii] Fécondation in vitro et embryons surnuméraires

La fécondation in vitro (FIV) désigne une technique de procréation médicalement assistée consistant à favoriser la fécondation d’un ovule mature en l’imprégnant de sperme hors de la femme. Les ovules sont prélevés directement dans les ovaires après stimulation par traitement hormonal. L’ovule fécondé est placé quelques jours en incubateur, puis introduit dans l’utérus de la mère pour qu’il s’y développe à l’instar d’un enfant engendré naturellement.

Lors d’une fécondation normale, à l’intérieur de la femme (in vivo), seuls 50% des embryons s’implantent. Ce pourcentage est donc beaucoup plus faible si la fécondation à lieu à l’extérieur (in vitro). Pour espérer avoir une fécondation qui mène à une grossesse et à une naissance, il est donc obligatoire de féconder plusieurs ovules, et de former ainsi plusieurs embryons. De ces embryons formés certains sont implantés, donnent une ou plusieurs grossesses qui aboutissent à une naissance ou à une fausse couche. Les autres sont congelés dans de l’azote liquide à –196°, attendant une autre grossesse ou, s’il n’y a plus de désir de grossesse, sont conservés ou détruits. Ils sont appelés « embryons surnuméraires ». Ce sont des embryons dont le nombre ne cesse d’augmenter (100 à 200 de plus par année).

 

[iii] Idem note 2

[iv] Affirmations erronées, aberrations et contradictions du texte de loi

– l’article 2 définit un embryon surnuméraire comme n’ayant aucune chance de survie. Un embryon conservé implanté à une femme a toutes les chances de survie voulues.

– l’article 3 interdit l’importation et l’exportation d’embryons surnuméraires, mais pas des cellules souches! (voir aussi 15 : 1)

– l’article 4 proscrit l’acquisition d’embryons ou de cellules souches contre rémunération, mais indique que les frais liés à la production, au traitement, et à la conservation de ces dernières peut donner lieu à une indemnisation.

– l’article 7 est on ne peut plus vague sur les restrictions de productions de cellules souches (p. ex. à l’alinéa 2c : comment définira-t-on « le nombre strictement nécessaire à la production de cellules souches » d’embryons surnuméraires? (id. 8 : 2b)

– à l’article 8, on découvre que les projets de recherche visant à améliorer les processus de production de cellules souches seront également autorisés, pas seulement ceux destinés directement à la guérison de maladies.

– au même article, alinéa 3d, on peut lire qu’un projet de recherche ne pourra être réalisé que s’il est acceptable au plan éthique. La substance même de cette loi bafoue l’éthique, or ses auteurs utilisent ce terme à plusieurs reprises, montrant ainsi qu’il n’a plus sous leur plume son sens propre de respect profond de la vie.

– à l’alinéa 4, on n’a aucune précision sur la nature de ces « experts indépendants » qui évalueront les projets sur les plans éthiques et scientifiques…, etc., etc., etc.

Article écrit par Niklaus Natacha & Python Marthe

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