Chronique de la Réforme en Valais - chapitre 5 (partie 2)
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Un des députés invita ses collègues à soumettre à leur retour leur conduite à l'approbation de leurs dixains respectifs; il s'appuyait sur l'adage qui veut que «tous jugent de ce qui tous intéresse.» L'évêque trouva son érudition bien déplacée et s'en retourna cacher ses chagrins dans son palais. Une main inconnue écrivit sur les murs de sa cathédrale : Hildebrand, dernier évêque de Sion.
Cependant la France, qui avait nourri les ressentimens du peuple, crut l'heure venue d'y mettre un frein. Elle voulait enlever le Valais à l'influence espagnole, mais n'avait point songé à en bannir le catholicisme. Elle chercha donc à rapprocher les Valaisans de l'évêque sans cesser de tendre à ses fins.
Que firent ses envoyés dans ce but? Ils montrèrent aux Valaisans qu'ils avaient également à éviter deux écueils; celui de la diversité de religion et celui de la multitude des alliances. Ils louèrent cette prudence et cette piété, le bon génie d'un pays jadis arrosé du sang des martyrs. Ils étaient sûrs que ces vertus ne leur permettraient pas d'amoindrir la considération et le pouvoir de l'évêché. Le prélat venait, il est vrai, d'ajouter aux griefs du peuple en faisant publier dès la chaire l'introduction du calendrier grégorien sans avoir consulté sur ce sujet les représentans du pays. Une étrange confusion en avait été la suite. Il avait suffi pour plusieurs que le calendrier leur fût présenté par la main de l'évêque pour qu'ils le rejetassent. D'autres avaient reçu le nouveau style. Il était donc arrivé que dans le même village, souvent sous le même toit, les uns comptaient les jours à la vieille manière, et que les autres en bien plus petit nombre, avaient commencé à compter différemment. Les envoyés de France prièrent les Valaisans «de sortir de ce chaos; de ne point se ranger, en conservant l'ancien style, au rang des Luthériens; de se rendre semblables à tous les états catholiques; de donner cette joie au nonce (13), au pape, et au roi très-chrétien, qui leur avait voué tant d'affection.» Ils les encouragèrent à faire acte d'obédience au nonce. Ils leur firent aussi quelque reproche «d'avoir en rejetant les pères jésuites, attiré sur eux les yeux de toute l'Europe, et de s'être exposés au danger qu'il y avait à contester avec les intéressés en cette matière». C'était une manière de se laver en la présence du souverain pontife; car personne n'avait plus contribué que les envoyés de France à faire expulser de Sion les jésuites milanais.
Notes :
13) Nonce :
Agent diplomatique du Saint-Siège, archevêque titulaire accrédité comme ambassadeur permanent du Vatican auprès d'un gouvernement étranger.
Sources :
Cette série d'articles est tirée de Le Chroniqueur, recueil historique et journal de l'Helvétie romande, renfermant le récit de la Réformation de ce pays publié dans les années 1835 et 1836, Imprimerie et librairie de Marc Ducloux. Compilation et mise en forme : APV.